Etre un perdant. Qu’est-ce que perdre signifie réellement ?
Gagner. Qu’est-ce que gagner signifie réellement ?
Si vous êtes comme moi, perdre n’est pas un souci. Mais être un perdant le devient. En ce moment, je nettoie ce voile en moi.
Mais avant de vous parler de cette libération, remettons un peu de contexte. Il y a quelques semaines, je nettoyais une partie qui cherchait à briller aux yeux des autres, non pas briller comme un star, briller comme un phare dans la nuit pour que les bateaux en perdition trouvent leur chemin et ne viennent pas échouer sur les côtes. Briller pour montrer un autrement possible. J’ai vu combien ce souhait de briller pouvait être une action positive, altruiste sous certains plans. Mais j’ai aussi vu comment la volonté de briller combinée à la volonté de réussir et de gagner avait créer des attentes peu glorieuses comme briller en tout lieu et souhaiter que les gens voient, reconnaissent et apprécient cette lumière à visée salvatrice. Briller et sa volonté d’être vu ont aussi eu comme effet de créer une sur-adaptation, une recherche constante de trouver comment être vu comme tel dans les différentes situations. Cette sur-adaptation a généré une perte d’authenticité et de simplicité. Les attentes ont créé la peur d’être perdante, de ne pas y arriver. En libérant le besoin de briller, a disparu la sur-adaptation. Depuis, être telle que je suis, juste ce que je suis, est devenu plus simple, plus juste, plus authentique.
Mais est restée jusqu’à ce jour la peur d’être une perdante. Gagner non pas pour être la meilleure, gagner pour ne pas être une perdante. Car être une perdante, c’est accepter que tout ce pour quoi j’ai lutté dans cette vie était finalement sans réelle valeur. Accepter d’être une perdante, c’est prendre le risque de perdurer sans un soi fort, juste en étant dans les choses telles qu’elles sont.
Alors j’accepte, petit à petit. Je me pose dans cette peur de perdre et je la vois dans chacune de mes luttes, dans toutes mes relations. C’est en filigrane pour continuer à exister fortement, pour être indépendante, pour être libre. Ne pas perdre quelque soit le degré d’importance parce qu’autrement c’est reconnaitre que je n’ai jamais réellement gagné, que je n’ai jamais réellement eu d’influence sur les évènements, que je ne suis pas totalement libre de mes choix. Dans ces conditions, puis-je encore dire que je suis quelqu’un de valeur, puis-je encore dire que je suis forte, puis-je encore penser que je dois contrôler ma vie. Bouh, c’est effrayant. Ça fouette, ça résiste, ça occulte, ça fuit, ça vibre à tout va en moi. Et en même temps la partie sage observe la libération. C’est toujours ainsi que ça se passe. Alors cette fois aussi, on reste à l’intérieur en conscience et on laisse la conscience transformer et libérer.
Ce sont d’autres fondements du soi qui se délitent. Je dis souvent depuis quelques semaines « on veut me briser » comme quand on cherche à briser une personnalité. Vu sous un angle moins tragédien, ça se brise en moi. Dans un précédent article « Sentiment de déconsidération (Roue du Samsara) » de décembre 2023, je vous parlais d’une libération de l’émotion de déconsidération ayant amenée mon noyau dur, mon essence ou encore Alaya Vijnana à se désintégrer. Maintenant, les intentions contenues dans ce noyau n’ont plus de support auquel s’accrocher ni de protecteur pour les faire vivre. Le soi étant éclaté, il ne peut plus faire perdurer de telles croyances, de telles stratégies mises en place pour perdurer. Alors tout peut être vu désormais sous un autre angle. Comme la volonté de briller, la volonté de ne pas perdre peut être lâchée.
Ce processus est avancé mais pas encore terminé. Je commence toutefois à voir à travers le voile de cette émotion perturbatrice nommé « peur d’être une perdante ». Ce qu’il y a derrière, c’est de l’équanimité. Agir parce que c’est juste, et non plus pour éviter de perdre. Parler parce que c’est juste, et non plus pour continuer à faire connaitre. Penser à ce qui est juste, et non plus pour élaborer des stratégies et des tactiques pour atteindre l’objectif et ne pas perdre.
Et je me vois lâcher ce que je tenais ces derniers jours juste parce que ça ne voulait pas perdre. Et dans ce processus la notion de gagner ou perdre n’existe plus. Il ne reste que le moment présent, l’action présente, la parole présente.
Et vous, qu’est-ce qui motive vos luttes, vos combats, vos ambitions ? La peur de perdre en fait-elle partie ?
Christelle Hauteville-Chadorla
